La Sécurité sociale française, engagée pour une IA éthique au service de l’intérêt général
Le 9 avril 2025, la Commission européenne a publié une Communication établissant un plan d’action pour le continent de l’IA afin que l’Union européenne devienne « un acteur mondial de premier plan dans le domaine de l’intelligence artificielle » (IA). Le même jour ont été lancés une consultation publique et un appel à contributions afin d’adopter, cette année, une stratégie pour l’application de l’IA, dont l’un des objectifs serait de « favoriser l’intégration de solutions d’IA dans le secteur public afin d’améliorer sensiblement la qualité des services proposés au public. »
La Représentation européenne des institutions de sécurité sociale (Reif) salue l’adoption d’une telle stratégie, ses membres étant activement impliqués depuis longtemps dans le développement de différentes méthodes d’IA – Machine et Deep Learning, Big Data – en vue d’améliorer la délivrance des prestations sociales, et plus récemment, des expérimentations d’intelligence artificielle générative (IAG) et de LLM, à la suite du lancement, fin 2022, de ChatGPT.
Chargées d’une mission de service public et traitant, dans ce cadre, quotidiennement les données personnelles de 68,6 millions d’usagers, les institutions françaises de sécurité sociale abordent les expérimentations d’IAG avec la plus grande prudence, compte tenu des risques avérés tels que la divulgation des données sensibles, s’y engageant seulement lorsque celles-ci démontrent une valeur ajoutée significative, bénéficiant à l’intérêt général. Cette approche mesurée contraste avec l’évolution rapide des technologies d’IA, rendant leur intégration dans le secteur public d’autant plus complexe.
La lutte contre le non-recours aux droits constitue notamment l’un des défis majeurs de la sécurité sociale. L’IAG pourrait ainsi permettre de développer des solutions afin d’aller au-devant des usagers et ainsi identifier les situations où les individus, souvent les plus vulnérables, ne bénéficient pas des prestations auxquelles ils ont légalement droit, la raison principale étant le manque d’information.
Mais aussi est-il indispensable de souligner que l’IAG n’est pas une solution miracle et ne saurait résoudre, à elle seule, l’ensemble des problématiques qui entravent le bon fonctionnement du service public, telles que la réduction du non-recours aux droits et la fracture numérique. L’impact carbone, et plus largement environnemental, considérable de ces technologies doit également être pris en compte avant de lancer toute nouvelle expérimentation.
La conformité à la législation européenne, et notamment au règlement général sur la protection des données (RGPD) et au règlement sur l’IA, qui entre progressivement en application, constitue, pour la Reif, une priorité majeure. Nous tenons à souligner qu’il est indispensable pour garantir la confiance des usagers que ces développements s’inscrivent dans une approche éthique, conformément aux exigences et principes contenus dans les lignes directrices en matière d’éthique pour une IA digne de confiance et dans la déclaration européenne sur les droits et principes numériques, tels que la transparence, le contrôle humain, et la finalité de promouvoir « le bien-être sociétal et environnemental ».
Résumé des demandes de la Reif :
- Adopter une approche proportionnée et garantir la sécurité et la cohérence juridiques dans le cadre de la démarche de simplification réglementaire ;
- Publier le plus tôt possible l’ensemble des documents de mise en œuvre du règlement sur l’IA et apporter des clarifications sur la classification des systèmes d’IAG et l’articulation entre le règlement sur l’IA et le RGPD ;
- Associer les institutions de sécurité sociale aux instances consultatives mises en place par la Commission européenne en matière d’IA ;
- Investir dans des infrastructures européennes d’entraînement et d’hébergement qui soient capables d’aider les institutions de sécurité sociale à développer des solutions d’IA de manière efficace et robuste dans le respect de la règlementation européenne ;
- Mettre en place une interface d’échange transfrontière à l’échelle européenne qui permettrait de partager les cas d’usage d’IA testés et industrialisés ;
- Assurer que l’Académie européenne des compétences en IA dispense des formations spécifiques au personnel des institutions de sécurité sociale ;
- Élaborer une cartographie permettant de comprendre l’impact de l’IAG sur les métiers et de recenser les besoins de formation ;
- Assurer que les organismes de sécurité sociale soient clairement éligibles en tant qu’organismes chargés d’une mission de service public dans le cadre du plan financier pluriannuel 2028-2035.
